Carte blanche aux élus

Carte blanche aux élus

Alors que la confiance des citoyens envers la classe politique ne cesse de dégringoler, à Outremont, la mairesse nous demande  de lui donner carte blanche dans plusieurs aspect de la vie municipale. Le discours est bien connu : les gens en position de pouvoir aiment avoir le champ libre et ne pas être limités par la rigidité de la règlementation et par les consultations publiques.  Depuis septembre dernier, les dossiers présentés au Conseil en sont largement la preuve.

Changement de zonage sans consultation publique : Après que le conseiller Moffat eu déposé un avis de motion, l’équipe d’Union Montréal a légalisé la garderie Toldos installée en infraction au zonage depuis 4 ans dans le cul-de-sac de l’avenue Querbes, au nord de Van Horne  sans tenir de consultation publique. La mairesse, Marie Cinq-Mars, a justifié l’absence de consultation en brandissant un article d’une loi provinciale du ministère de la famille. Sauf que cette loi n’interdit aucunement les consultations publiques,  ni n’oblige en aucun temps l’administration municipale à légaliser une garderie qui s’est placée en infraction. Malgré les représentations des citoyens du secteur, la mairesse a utilisée son droit de gérance pour faire du ‘spot zoning’. Elle a cependant promis aux citoyens lésés une rencontre d’information, après le vote pris à la séance du Conseil.

Selon les dires d’une personne proche du parti au pouvoir, ce bâtiment qui abrite la garderie Toldos, au 845 Querbes, aurait servi de centre d’appel pour le parti d’Union Montréal durant la campagne électorale de 2005. Les proprios de ce bâtiment possèdent également l’immeuble du 6010 Durocher, situé à l’intersection Lajoie, qui abrite le local vacant anciennement utilisé comme synagogue jusqu’au jugement de la cour supérieur qui obligea sa fermeture en 1999. Ce local est encore utilisé, à l’occasion, pour des activités non résidentielles, en infraction au règlement de zonage.

Règlement sur les projets particuliers d’urbanisme : Chaque arrondissement a un règlement de zonage et un plan de zonage. Ceux-ci permettent aux citoyens de connaître les règles qui régissent leur environnement. Le règlement de zonage établit le nombre d’étages et la hauteur des bâtiments, le pourcentage maximal du sol qui peut être construit sur un lot, et l’usage du bâtiment. La règlementation autorise le Conseil à approuver une dérogation mineure au plan d’urbanisme. Les dérogations mineures sont bien encadrées par la Loi et ne s’appliquent pas au changement d’usage ni à la densité d’occupation du sol. On y a recours généralement pour les problèmes de marges de recul.

En septembre, l’Administration Cinq-Mars a déposé un projet de règlement permettant de déroger à tous les éléments du règlement d’urbanisme. Bien qu’il en soit au premier dépôt et que ce genre de règlement oblige la tenue d’une consultation publique avant l’adoption, l’intention de la mairesse a été exprimée. Ce règlement est connu sous le nom de règlement sur les projets particuliers. C’est ce règlement qui a permis au Plateau, sous la gouverne de Projet Montréal, d’autoriser au printemps dernier l’agrandissement non permis au règlement de zonage de la synagogue bobov, autorisation qui a été bloquée par la mobilisation des citoyens.

Le stationnement géré par ordonnances : Depuis quelques mois, des hassidim revendiquent aux séances du Conseil la levée du règlement de stationnement pour les jours de fêtes juives, à la façon de la ville de Hampstead avec son récent règlement sur l’interdiction de faire du bruit les jours de fêtes juives, règlement désapprouvé par le ministre des Affaires municipales. Certains hassidim ont même contesté leur contravention de stationnement en 2003 prétextant la Charte et le droit à la liberté de religion, et ils ont perdu leur cause. Le juge a énoncé que ‘Le tribunal est tout à fait incapable de relier les questions de charte sur la liberté de religion avec le règlement municipal qui interdit de stationner son véhicule à certains endroits et à certaines heures.  Il est certain que ce règlement cause des inconvénients mais il cause des inconvénients à tous les citoyens qui habitent Outremont et qui veulent  stationner leur véhicule dans les limites du territoire de la ville d’Outremont qui est maintenant Montréal.   Et la cour ne peut pas voir dans l’application de ce règlement une atteinte directe à la liberté de religion du défendeur’. Il rapporte également les propos du procureur de la Ville : ‘Le procureur de la poursuivante donnait l’exemple également de n’importe quel citoyen qui, si il sait qu’il doit faire un voyage prolongé et ce citoyen choisit de laisser son véhicule stationné, il risque fort à son retour d’avoir une contravention puisque si la signalisation indique qu’on ne peut stationner son véhicule à certains moment et à certains endroits’.

Voilà qu’au Conseil de septembre, le conseiller Louis Moffat a déposé un avis de motion afin de permettre la gestion du stationnement par ordonnance. Ce mode de gestion par ordonnances permet de contourner la règlementation en vigueur. Le problème est que dans cet avis de motion, rien n’est prévu au règlement comme encadrement. Donc tout est possible!  Cette très grande liberté d’octroyer des ordonnances est inquiétante sur les intentions de la mairesse et questionnable sur sa légalité.

Par contre, des ordonnances bien encadrées pourraient être des outils intéressants de gestion et éviter de donner carte blanche à l’équipe au pouvoir. Il faudrait mentionner au règlement que toutes demandes de permission en conflit avec les heures de balayage ne sont pas acceptables, ni avec les secteurs régis par des vignettes de résident. Également, qu’une ordonnance n’est valable que pour une période de 6 heures maximum, par exemple. Ainsi, si quelqu’un organise une grande réception chez lui (mariage, par exemple) l’arrondissement pourrait l’accommoder pour le stationnement des nombreux visiteurs, si c’est possible dans ce secteur. Ce serait la même chose pour les besoins spécifiques et très ponctuels de bâtiments publics, comme le théâtre Outremont ou les lieux de culte. Détourner l’application du règlement pour des journées entières et consécutives, sur le principe de revendication religieuse, demeure fortement questionnable.

Gérer au cas par cas
Il est compréhensible que les règlements soient contraignants, c’est la raison même de leur existence! Mais ces règlements sont justement établis pour défendre les intérêts publics d’une société. Il faut être très prudent à gérer au cas par cas. L’intérêt public peut facilement être compromis par des intérêts individuels ou partisans. Il ne faut pas tenter le diable…..